« De la République des Lettres aux logiciels libres » : différence entre les versions

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Il n'est pas anodin de rappeler qu'un des essais majeurs de Richard Stallan sur le logiciel libre s'intitule «Pourquoi les logiciels ne doivent pas avoir de propriétaire» (1994)<ref>Richard Stallman, «[https://www.gnu.org/philosophy/why-free.fr.html Pourquoi les logiciels ne doivent pas avoir de propriétaire]», ''gnu.org'', 1994.</ref>. Cet essai consiste en une réfutation en règle des motifs invoqués par les propriétaires de logiciels pour être les seuls à jouir de la liberté d'utiliser, de copier de modifier les logiciels. Il affirme notamment : «Le fait qu'[un objet matériel] ait ou non un propriétaire ne change pas sa ''nature'', ni son utilité au cas où vous en faites l'acquisition. Pour un programme c'est différent. Le fait qu'il ait un propriétaire modifie nettement sa nature, et ce que vous pouvez en faire si vous en achetez un exemplaire. [...] de quoi la société a-t-elle besoin ? D'une information vraiment disponible pour ses citoyens. Par exemple, des programmes que les gens peuvent lire, réparer, adapter, améliorer, et pas seulement faire marcher. Or ce que les propriétaires de logiciels livrent généralement est une boîte noire que personne ne peut étudier ni modifier.» Dans un autre essai un peu plus long paru en 1991<ref>Richard Stallman, «[https://www.gnu.org/philosophy/shouldbefree.html Pourquoi le logiciel doit être libre]», ''gnu.org'', 1991.</ref>, Stallman utilise l'analogie des routes à péages (''toll roads'') ou sans péages (''free roads'') pour introduire ses idées à propos des logiciels dont l'usage est libre et ceux dont l'usage est restreint (et payant) car ils ont un propriétaire qui n'est pas le public. Je vous invite à lire les essais de Stallman si ce n'est pas déjà fait.
Il n'est pas anodin de rappeler qu'un des essais majeurs de Richard Stallan sur le logiciel libre s'intitule «Pourquoi les logiciels ne doivent pas avoir de propriétaire» (1994)<ref>Richard Stallman, «[https://www.gnu.org/philosophy/why-free.fr.html Pourquoi les logiciels ne doivent pas avoir de propriétaire]», ''gnu.org'', 1994.</ref>. Cet essai consiste en une réfutation en règle des motifs invoqués par les propriétaires de logiciels pour être les seuls à jouir de la liberté d'utiliser, de copier de modifier les logiciels. Il affirme notamment : «Le fait qu'[un objet matériel] ait ou non un propriétaire ne change pas sa ''nature'', ni son utilité au cas où vous en faites l'acquisition. Pour un programme c'est différent. Le fait qu'il ait un propriétaire modifie nettement sa nature, et ce que vous pouvez en faire si vous en achetez un exemplaire. [...] de quoi la société a-t-elle besoin ? D'une information vraiment disponible pour ses citoyens. Par exemple, des programmes que les gens peuvent lire, réparer, adapter, améliorer, et pas seulement faire marcher. Or ce que les propriétaires de logiciels livrent généralement est une boîte noire que personne ne peut étudier ni modifier.» Dans un autre essai un peu plus long paru en 1991<ref>Richard Stallman, «[https://www.gnu.org/philosophy/shouldbefree.html Pourquoi le logiciel doit être libre]», ''gnu.org'', 1991.</ref>, Stallman utilise l'analogie des routes à péages (''toll roads'') ou sans péages (''free roads'') pour introduire ses idées à propos des logiciels dont l'usage est libre et ceux dont l'usage est restreint (et payant) car ils ont un propriétaire qui n'est pas le public. Je vous invite à lire les essais de Stallman si ce n'est pas déjà fait.


En plus de priver les utilisateurs et utilisatrices de quelques uns des principaux avantages du logiciel, les multinationales en quête de monopole qui se déclarent propriétaires d'un logiciel créent une ''rareté factice''. Ces entreprises ont trouvé la recette magique qui a produit les premières fortunes du monde dans les années 1980, 1990 et 2000. Quelle est cette recette ?
En plus de priver les utilisateurs et utilisatrices de quelques uns des principaux avantages du logiciel, les multinationales en quête de monopole qui se sont déclarées propriétaires de nos logiciels créent une ''rareté factice''. Ces entreprises ont trouvé la recette magique qui a produit les premières fortunes du monde dans les années 1980, 1990 et 2000. Quelle est cette recette ?


# s'approprier le fruit du travail de développeurs qui acceptent de se départir de leur droit d'auteur en échange d'un salaire ou d'une somme d'argent
# s'approprier le fruit du travail de développeurs qui acceptent de se départir de leur droit d'auteur en échange d'un salaire ou d'une somme d'argent
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WebKit est une bibliothèque de rendu utilisé par un bon nombre de navigateur web, dont Safari de Apple, et Chrome de Google jusqu'à la version 27 parue en 2013<ref>Vincent Hermann, «[http://www.nextinpact.com/news/78804-google-quitte-webkit-et-officialise-blink-son-nouveau-moteur-rendu.htm Google quitte Webkit et officialise Blink, son nouveau moteur de rendu]», ''nextinpact.com'', 4 avril 2013.</ref>. Son histoire débute quand Apple clone KHTML, la bibliothèque de rendu utilisée par Konqueror, le navigateur web de l'environnement graphique KDE. Avec le temps beaucoup de développeurs convergent sur le développement de WebKit, si bien que pendant quelques années KDE, Apple, Nokia, BlackBerry, Samsung et Google contribuaient à un logiciel intégré à des applications parfois concurrentes comme Safari de Apple, Chrome de Google. Il ne semble y avoir jamais eu de structure formelle pour soutenir le développement de WebKit, qui appartient toujours à Apple. On a affaire ici à une mutualisation ''had hoc'' et circonstancielle, comme il arrive parfois (souvent ?) dans le milieu du logiciel libre.
WebKit est une bibliothèque de rendu utilisé par un bon nombre de navigateur web, dont Safari de Apple, et Chrome de Google jusqu'à la version 27 parue en 2013<ref>Vincent Hermann, «[http://www.nextinpact.com/news/78804-google-quitte-webkit-et-officialise-blink-son-nouveau-moteur-rendu.htm Google quitte Webkit et officialise Blink, son nouveau moteur de rendu]», ''nextinpact.com'', 4 avril 2013.</ref>. Son histoire débute quand Apple clone KHTML, la bibliothèque de rendu utilisée par Konqueror, le navigateur web de l'environnement graphique KDE. Avec le temps beaucoup de développeurs convergent sur le développement de WebKit, si bien que pendant quelques années KDE, Apple, Nokia, BlackBerry, Samsung et Google contribuaient à un logiciel intégré à des applications parfois concurrentes comme Safari de Apple, Chrome de Google. Il ne semble y avoir jamais eu de structure formelle pour soutenir le développement de WebKit, qui appartient toujours à Apple. On a affaire ici à une mutualisation ''had hoc'' et circonstancielle, comme il arrive parfois (souvent ?) dans le milieu du logiciel libre.


=== Les bénéfices, les défis et les pièges de la «gratuité» du numérique ===
== Les bénéfices, les défis et les pièges de la «gratuité» du numérique ==
Les logiciels libres ont un coût de reproduction négligeable grâce aux réseaux numériques, mais les produire, les maintenir, les améliorer, les enseigner aux utilisateurs et utilisatrices avec de la bonne documentation en français et de la formation adaptée aux besoin de chacun ne coûtent pas rien. Certains logiciels libres connaissent un grand succès et trouvent le financement nécessaire à leur développement continu, voire à leur croissance soutenue. D'autres logiciels libres, pourtant très utilisés, n'y arrive pas. Un cas dont on a beaucoup parlé dernièrement est celui de GNU Privacy Guard, le logiciel de cryptographie probablement le plus utilisé au monde pour assurer l’authenticité et la confidentialité des échanges par courriel. Un article de la journaliste Julia Angwin paru en février 2015 dans le site ''ProPublica''<ref>Julia Angwin, «[https://www.propublica.org/article/the-worlds-email-encryption-software-relies-on-one-guy-who-is-going-broke The World’s Email Encryption Software Relies on One Guy, Who is Going Broke]», dans ''ProPublica'', 5 février 2015.</ref> nous apprenait que Werner Koch, le développeur principal de GNU Privacy Guard gagnait en moyenne 25 000 $ annuellement depuis 2001 ! Après avoir songé à tout abandonner pour un emploi régulier et payant dans l'industrie en 2013, il a lancé en 2014 une campagne de financement qui s'est avérée un échec. Heureusement, le ''buzz'' créé par la nouvelle de ''ProPublica'' a «corrigé le bogue» si l'on peut dire : Koch a atteint son objectif de financement grâce à des dons et a en plus reçu des promesses de financement récurent de la part de Facebook et Stripe.
Les logiciels libres ont un coût de reproduction négligeable grâce aux réseaux numériques, mais les produire, les maintenir, les améliorer, les enseigner aux utilisateurs et utilisatrices avec de la bonne documentation en français et de la formation adaptée aux besoin de chacun ne coûtent pas rien. Certains logiciels libres connaissent un grand succès et trouvent le financement nécessaire à leur développement continu, voire à leur croissance soutenue. D'autres logiciels libres, pourtant très utilisés, n'y arrive pas. Un cas dont on a beaucoup parlé dernièrement est celui de GNU Privacy Guard, le logiciel de cryptographie probablement le plus utilisé au monde pour assurer l’authenticité et la confidentialité des échanges par courriel. Un article de la journaliste Julia Angwin paru en février 2015 dans le site ''ProPublica''<ref>Julia Angwin, «[https://www.propublica.org/article/the-worlds-email-encryption-software-relies-on-one-guy-who-is-going-broke The World’s Email Encryption Software Relies on One Guy, Who is Going Broke]», dans ''ProPublica'', 5 février 2015.</ref> nous apprenait que Werner Koch, le développeur principal de GNU Privacy Guard gagnait en moyenne 25 000 $ annuellement depuis 2001 ! Après avoir songé à tout abandonner pour un emploi régulier et payant dans l'industrie en 2013, il a lancé en 2014 une campagne de financement qui s'est avérée un échec. Heureusement, le ''buzz'' créé par la nouvelle de ''ProPublica'' a «corrigé le bogue» si l'on peut dire : Koch a atteint son objectif de financement grâce à des dons et a en plus reçu des promesses de financement récurent de la part de Facebook et Stripe.


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